La boutique des pandas

« Lorsque j’ai découvert le dessin animé des studios d’art de Shanghai de 1979, « La
boutique des pandas », j’ai d’abord été séduite par le côté farfelu et comique de cette
galerie de personnages. L’ambiance chaleureuse de cette petite boutique où l’on trouve
de tout, le voyage de petit panda et les défis auxquels il est confronté m’ont
immédiatement donné l’envie de porter cette histoire sur scène.
La naïveté et la tendresse des personnages, le charme désuet de la boutique familiale,
permettaient d’offrir aux enfants une parenthèse joyeuse et artisanale dans notre monde
dominé par la technologie et la virtualité des échanges, y compris commerciaux.
J’ai choisi de placer l’écriture sous une veine comique, mettant en évidence le burlesque
de la famille panda : le petit garçon qui n’aime pas ranger et aime faire des bêtises et
jouer à cache-cache, la grande sœur plus responsable mais qui s’amuse de tout, et le
grand-père colérique qui se laisse berner et attendrir par ses petits-enfants.
De même les trois situations de départ : une girafe qui cherche une écharpe, un
hippopotame un masque, un écureuil des bottines, sont drôles et absurdes par essence.
Cela m’a permis de développer des dialogues donnant la part belle au clown de chaque
personnage, en accentuant tel ou tel trait de caractère chez chacun : la prétention de la
girafe, la bonhommie de l’hippopotame, la pétulance d’Ecureuillette.
C’est pourquoi j’ai eu envie d’aller vers des formes d’expression concrètes comme la
peinture pour le décor et la musique, jouée en direct au piano pour l’univers sonore.
Pour une ambiance familiale et joyeuse, le piano apparait comme un instrument
rassembleur, et a de multiples facettes. Il peut exprimer toutes les voix à lui tout seul.
Ses possibilités m’ont inspirée de façon idéale pour mes compositions puisque je
souhaitais que la musique caractérise chacun des personnages.
Une musique majestueuse pour la girafe, puissante et rythmée pour l’hippopotame -qui
joue aussi de la trompette, espiègle et aérienne pour Ecureuillette.
Le piano accompagne également les émotions de Petit Panda et marque les évènements
qui surgissent lorsqu’il traverse, seul, les différents paysages.
Une chanson rassemble les enfants au début et à la fin du spectacle.
Ce spectacle retrace en double lecture la quête du protagoniste principal qui doit
honorer la confiance que lui a accordée son papi et gagner l’estime de sa grande sœur.
Au cours de son périple, il fait face à ses obstacles internes : la distraction au bord de
l’étang, la peur dans la forêt, l’imprudence dans la montagne.
Le spectacle met aussi en scène une relation de petit commerce très humaine : les clients
bigarrés, lors de leur attente, vont apprendre à se connaitre et la boutique devient un
vrai lieu de convivialité. On peut demander au papi des objets mais aussi un arc en ciel
ou un rayon de soleil, il trouvera cela dans ses tiroirs.
Pour le décor, j’ai souhaité que la boutique soit au départ comme un cocon pour la
famille panda, avec des grands panneaux de tissu noir représentant simplement et de
manière authentique son intérieur coloré et chaleureux.
Les paysages prennent vie grâce au regard du peintre Jean-Charles Yaich qui a choisi
de les représenter en « plan serré », à hauteur du personnage. Ainsi les enfants
s’identifient à lui, ils ont l’impression d’être avec lui au bord de l’étang, et
l’accompagnent cours de ses péripéties.
Il a utilisé une matière picturale simple, riche et profonde. Le spectateur plonge dans les
couches de couleur.
La boutique devient un « bric à broc » humble et touchant sous son pinceau.
Les panneaux pivotent en même temps que la musique, transformant
imperceptiblement les décors, créant à chaque fois des surprises pour les enfants.

Pour les artisans auxquels petit panda rend visite, j’ai pensé aux échoppes en couloir du
marché Jan Path de New Dehli, remplis de foulards multicolores jusqu’au plafond !
Le peintre et la costumière accessoiriste Carolina E. Santo ont élaboré en harmonie les
échoppes de la vache cordonnières et de la chèvre tricoteuse.
La costumière, avec son ingéniosité et ses drôles de trouvailles a réussi à figurer ces
animaux, certains de tailles extrêmes (la grande girafe, le gros hippopotame, et la toute
petite Ecureuillette) : masques, accessoires, marionnettes permettent en un tour de main
aux actrices d’incarner les nombreux personnages.
Le costume de la famille panda est simple sans jamais être caricatural, on est dans
l’évocation des animaux, avec délicatesse et humour, et en accord avec l’univers pictural
des décors.
La création lumière a été réalisée par Angélique Bourcet et Juliette Labbaye.
Elle souligne finement le caractère des personnages et les différents paysages. L’ajout
de leds dans les décors met en relief les panneaux et les rend encore plus vivants. »
Rafaële Arditti